Le pari de l’écureuil

Un jour de mi-automne,
Alors que seules les branches plafonnent
La forêt s’anime d’un débat
Entre deux bêtes tout en bas.
L’ambitieux jeune écureuil,
Estimant la hauteur d’un coup d’œil
Se vante à son amie
Une vieille grenouille aigrie.
« Vois-tu ce chêne, lui dit-il,
Je te parie un gland ou bien mille,
Que j’atteins sans souci sa cime. 

Ta mise est, ou vanité, ou bien frime, »
Lui répondit sa voisine,
« Tu n’as en cette discipline
Pas l’expérience nécessaire,
Plus familier des jupons de ta mère,
Que de l’escalade ou du saut. »
Mais sans attendre un autre mot,
L’ardent écureuillon part tout de go.
Il saute, grimpe, virevolte,
Et de manière désinvolte,
Poursuit son ascension sans cesser.
Ce n’est qu’à quelques mètres de la canopée,
Que notre héros glisse subitement,
Sa descente prenant encore moins de temps.
Le rongeur s’accroche et ralentit assez,
Pour survivre à la chute en pleine santé,
A la faveur d’un gros tapis de feuilles
Dans lequel atterrit notre écureuil.

Ce dernier, devant l’échec déprime,
Se sentant pour sa race illégitime.
« Tu vois, dit le batracien
Que l’échec de cet examen,
T’apprennes le sens de la mesure.
Si ton pari avait, pour sûr,
Porté sur la première branche,
Ta victoire aurait été bien franche.
Par trois fois, sinon quatre,
Ton objectif aurait pu battre. »

Qui attend grand échouera d’autant,
Qui attend petit facilement sera surpris.