Pour des oiseaux

Pour des oiseaux,

Ici la neige coule à flots et les torrents d’espoir se tarissent sans vos noms. Il y a des siècles maintenant que nous nous sommes abandonnés à l’île. C’était l’hiver en été et rien n’avait plus de sens que de vivre. Dès le matin nous vivions pour aimer et dès que nous aimions nous rêvions aux matins.

Ici les matins sont de plus en plus maussades, gris, tempétueux. Ecrire prend des semaines. Et les semaines deviennent des mois. Le ciel plombant mais pas de plomb, les rues sont sales. Les fleurs sont en exodes et ne reviendront surement pas. Le soleil ne s’attarde plus ou alors guère dans le reflet des flaques verdâtres. J’ai le goût de chemins infinis, de nos courses dorées à l’aube de nos vingt ans et de vos cheveux blonds embrassant la mer.

Alors, il y a des temps pour tout. Des temps pour lire de la poésie – la peau sur les rochers. Porter des robes qu’on regardera virevolter aux rythmes des rayons des vélos. Ecouter Françoise Hardy, Yann Tiersen, Marina et Jeanne Moreau. Tout pour nous rendre mélancolique, encore – encore – encore. Comme les perce-neiges sont sortis, nous pourrions lire dans les jardins. Des promenades amourachées, entre les bras verts des forêts, se battre pour avoir les bottes jaunes aux pieds. Des petits gribouillages au stylo du fond du sac en haut des papiers volants. Des sacs en tissu colorés et toujours pleins. Mémoriser vos éclats de rire comme des gouttelettes de bonheur qui montent et ruissellent à mes yeux ; aujourd’hui loin de notre coin du monde.

Des routes, puis des rails, puis un avion, encore des rails qui m’ont conduite loin de ces bonheurs vivifiants vers d’autres bonheurs plus éphémères, plus lassants, moins ensoleillés. Mon cœur est cependant loin d’être vide, il est tout en musique, tout en mélancolie, beaucoup de choses y sont en papier. Mais ce n’est pas ma maison. Pourtant l’endroit est superbe. Tout y est, tout vous ressemble mais rien n’est vous.

D’ici je veux prendre les chemins et les routes, parcours les places qui me ramènent toujours dans vos yeux.
Moi aussi, je ne rêve plus qu’aux changements des saisons, à la mer et à vous.

N’oublie pas, jamais, d’aimer les petites intensités.

« Il faut être toujours ivre. Tout est là : c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut nous enivrer sans trêve.Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous »

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